"Infidèlement vôtre" ("Unfaithfully Yours"), c'est un film de Preston Sturges, une comédie inventive, élégante et très, très drôle.

Comme dans beaucoup de comédies américaines, il s'agit d'un homme jaloux de sa femme. Il ne veut pas le reconnaître, mais il faut bien se rendre à l'évidence : elle le trompe. Forcément, elle est trop jeune et trop belle. Le cliché s'arrête là, parce que c'est un chef d'orchestre, et c'est la musique qui va lui inspirer les diverses réactions qu'il aura, ou pourrait avoir. La musique, surtout la musique classique, passe toujours très bien sur grand écran, et ça devient un régal quand il s'y rajoute comme cela des idées de scénarios originales et très excitantes. La mécanique se met en place, la mise en scène précipite les événements, et on ne reprend presque plus ses esprits jusqu'à la fin du film.

Le héros est Rex Harrison. Il n'est pas très bon au début, quand il fait du Rex Harrison, avec sa distinction anglaise, sa langue bien pendue et son oeil de velours. Par contre, il est impeccable en chef d'orchestre : au lieu de se mettre à faire des grands gestes dans tous les sens comme ce serait le plus facile dans une comédie, il joue tous les gestes du maestro avec la plus grande justesse. Et il est absolument génial quand il fait du Buster Keaton, plus tard, dans une longue séquence presque muette.

Elle, c'est Linda Darnell. Ce n'est pas la meilleure actrice de sa génération (la concurrence était dure), mais, devant la caméra de Sturges, elle perd sa mollesse et apporte un charme considérable qui n'a rien à envier à Rex Harrison.

Bref, "Infidèlement vôtre", après un début qui fait penser à du Lubitsch en moins réussi, c'est une série d'excellentes idées de scénario mises en oeuvre d'une manière irrésistible, et des acteurs en forme. C'est bien la meilleure comédie de l'été.

Thierry Bézecourt
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